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ANCIENNES FORGES DE L'AGENAIS


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LES ANCIENNES FORGES DE L'AGENAIS

Fédération historique du sud-ouest, Fédération des sociétés académiques et savantes du Languedoc - Pyrénées - Gascogne
Actes des 14ème et 17ème Congrès d'études régionales tenus à Villeneuve sur lot en mai 1961
Histoire, Art, Géographie, Economie.

Le territoire de l'actuel département de Lot et Garonne comprenait autrefois deux régions, nous ne saurions dire "industrielles", mais "usinières" : le Haut-Agenais, essentiellement les vallées de la Lède et de la Lémance, et l'Albret, mais à un degré bien moindre. En dehors de ces deux centres et des manufactures de toiles à voiles et d'indiennes de la ville d'Agen de la deuxième moitié du 18ème siècle, l'Agenais d'autrefois ne connaissait que les corderies, les tanneries, la chapellerie et les moulins à blé, à huile ou à draps, les unes dans des ateliers de bon nombre de petites villes, les autres dispersés le long de tous les cours d'eau.

La région composée du canton actuel de Fumel et d'une partie de celui de Monflanquin, soit des cxommunes de Fumel, Monsempron, Cuzorn, Saint-Front, Sauveterre, Blanquefort, Lacapelle-Biron, Montagnac et Gavaudun, neuf en tout, comptait sous l'Ancien Régime une quinzaine de papeteries, une industrie verrière, modeste, autour de Biron, un martinet à cuivre et un certain nombre de forges à fer dont nous établirons ci-dessous la liste.

Il est impossible, faute de documents, de déterminer la date de création de la quasi totalité des usines de fer de la région du Haut-Agenais. On peut la présumer fort ancienne car les conditions dans lesquelles elle a vécu sont les mêmes que dans les régions voisines du Quercy pour lesquelles les recherches de M. Lartigaut ont permis de faire remonter cette industrie au 14ème siècle au moins.

Aucun fonds d'archives seigneurial, communal ou privé ne subsistant plus pour le Nord-Est de l'Agenais, il ne nous est pas possible de remonter aussi loin dans le temps. On peut supposer que l'industrie du fer existant dans cette région sombra avec les dévastations de la guerre de Cent Ans. Après 1460, l'Agenais se repeuple et relève ses ruines. Nous le constatons par le nombre élevé de baux à nouveau fief passés entre 1480 et 1510 au Sud du Lot et parmi lesquels figure le premier acte concernant une "mouline de fer" à Libos.

Quelques références éparses nous sont ensuite fournies par des documentrs quercynois relevés par M. Lartigaut. Puis nous aurons deux références du 16ème siècle avant de commencer l'historique des forges à fer au 17ème siècle, grâce aux minutes notariales de Fumel et de Sauveterre, seules sources homogènes et continues de documentations dont disposent pour cette région les Archives de Lot-et-Garonne.

Les "Incommodités d'Agenois", rédigées en 1552 en vue d'apitoyer le pouvoir royal pour obtenir une modification de la répartition des impôts en faisant ressortir la pauvreté du pays et son peu de ressources en tous genres, résume assez bien en quelques phrases la raison d'être des forges dans cette région, et le triste état de cette industrie au milieu du 16ème siècle, tableau d'ailleurs quelque peu noirci pour les besoins de la cause :

...... et estoyt entienement ledict pays et concistoyt en forests lesquelles ont esté coppées au pied vers ledit quartier de Gaubaudun, rives et limites de Quercy pour faire forges y estant la terre bonne pour faire ledict fert. Dict que a présent a faulte de boys et terre utille pour faire lecidt fert les ferrières qui souloyent estre esdicts terroires et jurisdcictions sont delaisses et habandonnés tellement que a present on y faict fer aulcun et ainsy cesse la commodite dudict pays dagenoys........

De temps immémorial, il y a donc eu des forges dans cette partie de l'Agenais car on y trouvait à la fois la matière première  et le bois l'indispensable combustible que fournira, toujours en quantité insuffisante, cette région qu'on appelle le Pays au Bois (Archives municipales d'Agen).

Un état des mines et carrières dressé en 1811 par l'Administration des Domaines (série Q non classée) disait à peu près la même chose que le document de 1552 : "La facilité des exploitations plutôt que la richesse des mines a déterminé quelques particuliers à construire des forges et hauts fourneaux". Et le rapport mentionne les deux principaux centres d'exploitation du minerai de fer : Gavaudun et Lacapelle-Biron autour desquels, sur quatre kilomètres carrés, on extrayait le minerai par puits, coupes obliques ou en circuit. Les exploitants étaient les propriétaires de forges qui ne payaient aucune redevance à l'Etat et rémunéraient les propriétaire des terrains sur la base de 25 centimes  le quintal "poids ancien", c'est-à-dire environ 50 centimes pour un de nos quintaux métriques.

Ce système d'exploitation des "minières" devait déjà être le même avant la Révolution et tout au cours des siècles. La profession de "tireur de mine" était répandue dans les vallées de la Lède et de la Lémance, exercée par des manoeuvres qui partageaient leur temps entre la minière et le travail d'ouvrier non spécialisé à la forge voisine ou celui d'ouvrier agricole. Les poches de minerais étaient dispersées sur de grandes surfaces sans qu'il y eût à proprement parler de mines nettement localisées et les minutes notariales comportent nombre d'actes de ce genre : en 1726, Maître Pierre Bel, avocat et juge de Bonaguil achète toute la "mine" qu'il pourra faire tirer en un an d'une vigne sise à Fumel le long du chemin de Saint-Jacques, à raison de deux sols la charretée.

La région de Fumel était même exportatrice de minerai. Un acte de l'an XI nous montre les frères Benets, habitant Pourquiès, commune de Fumel, vendant à Pierre Aleman, maître de beteau à Villeneuve, 2000 quintaux de "mine nette de terre et autres mauvaises matières rendus dans l'espace de six mois au port de Libos à Fumel à mesure qu'ils la tireront au prix de 35 centimes le quintal.

Les "Incommodités d'Agenois" nous parlent du combustiblez dont ce texte, premier d'une litanie qui durera jusqu'au 19ème siècle, nous fait ressortir la rareté et du minerai dont seul le rédacteur de 1552 déplore la raréfaction, trois siècles avant l'extinction des forges de la Lémance.

Il est un troisième point dont ce texte ne parle pas, et pour cause, mais dont tous les usiniers eurent à se préoccuper tout au long des siècles : la force motrice. Elle était fournie essentiellement par quatre cours d'eau : le Dropt (40 km. 50 de cours en Lot-et-Garonne), la Lède (52 km), la Lémance (24 km), et la Thèze (3 km). Or, si nous nous en rapportons à Cassany-Mazet, auteur d'"Essais statistiques sur le 4ème arrondissement de Lot-et-Garonne", en 1839, le Dropt faisait mouvoir 30 moulins à blé, la Lède 39, plus 4 papeteries, une forge à fer, 8 foulons et 2 pressoirs à huile. Sur la Lémance, on trouvait 12 moulins, 7 papeteries, 5 forges, 4 foulons, 2 pressoirs à huile et un martinet à cuivre. Enfin, la Thèze, sur un cours des plus réduits, comptait deux moulins, deux papeteries et une forge. C'est-à-dire que sur un parcours total de 119 kms fonctionnaient 120 usines, soit une usine tous les kilomètres à peine.

La minuscule Briolance, affluent de la Lémance, actionnait deux moulins et une forge. Et encore la statistique de Cassany-Mazet ne porte-t-elle que sur le dé but du 19ème siècle, époque où déjà certaines usines avaient disparues, comme la papeterie de Blanquefort.

A suivre...









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